Let's this man speaks
Ouaip, vous le savez peut être, mais la presse papier, de façon mondiale est en crise et ce pour pas mal de raisons. La presse people quand à elle et ce, à mon grand désarroi d'ailleurs, se porte plutôt pas mal.....
Je suis personnellement abonné à quelques mensuels et hebdo qui me tiennent à coeur pour la simple et bonne raison qu'on y propose des analyses d'évènements mondiaux et nationaux qui nous change radicalement de TF1 (pour faire court).
Entre autre le Monde Diplomatique.
Depuis cet été ils lancent des appels de soutien.
Dans le paysage médiatique franaçais, cela serai vraiment dommage qu'on journal proposant un réel trvail de fond disparaisse.....
Laissons Serge Halimi parler.
Ca et réfléchir sont deux choses qu'il fait plutôt pas mal :
Par Serge Halimi
Depuis vingt ans, Le Monde diplomatique annonce la formation
du cyclone économique qui, aujourd’hui, dévaste les salles de rédaction
et dépeuple les kiosques. L’analyse des causes ne prémunissant pas
contre les effets, notre journal éprouve lui aussi les conséquences des
intempéries. Moins que d’autre titres, et d’une manière différente : ni
sa survie ni son indépendance ne sont en cause, mais les moyens
manquent à son développement. Pour éclairer l’avenir, prendre toute sa
part à la bataille d’idées, transmettre enfin à de nouveaux lecteurs
notre manière de voir et de déchiffrer le monde, nous faisons appel à
vous. Après le textile, la sidérurgie, l’automobile… la presse. Les
ouvriers des pays du Nord ont payé au prix fort la délocalisation de la
production vers le Sud ; avec la migration de leurs lecteurs vers
Internet, c’est au tour des journalistes de voir disparaître leurs
emplois. On pourrait conclure qu’un modèle économique chasse l’autre,
soupirer que la roue tourne, que c’est la vie. Mais, aussitôt, il est
question de démocratie. L’automobile, nous dit-on, loin de constituer
un bien public irremplaçable, n’est qu’une marchandise. On peut la
fabriquer ailleurs, autrement, lui substituer un mode de transport
différent. Rien de très grave au fond. Tandis que la presse... Cette dernière dispose d’un atout de poids dans le débat public.
Quand elle juge son existence menacée, elle sonne le tocsin plus
facilement qu’un ouvrier dont l’usine s’apprêterait à fermer. Et pour
rallier chacun à son étendard, elle n’a qu’à prononcer la formule
rituelle : « Un journal qui disparaît, c’est un peu de démocratie qui meurt. »
L’énoncé est pourtant absurde, burlesque même. Se rendre à un kiosque
suffit pour constater que des dizaines de titres pourraient cesser
d’exister sans que la démocratie en pâtisse. Les forces de l’ordre
idéologique perdraient même dans l’affaire quelques-uns de leurs
commissariats. Cela ne rend pas illégitimes les inquiétudes des
journalistes concernés. Mais des milliards de gens sur terre n’ont nul
besoin pour défendre leur emploi de lui inventer d’autre vertu que
celle de leur procurer un salaire. Depuis quelques années, l’industrie de presse décline. Le
journalisme, lui, souffre depuis beaucoup plus longtemps. Les contenus
rédactionnels étaient-ils en effet mirobolants il y a vingt ans quand
la plupart des périodiques constituaient des sacs à publicité et des
machines à cash ? Et quand, aux Etats-Unis, les mastodontes New
York Times Co., Washington Post Co., Gannett, Knight Ridder, Dow Jones,
Times Mirror amassaient des profits vingt fois supérieurs à ceux de
l’ère du Watergate, apogée du « contre-pouvoir » (1) ?
Doté de tels moyens, adossé à des marges annuelles atteignant 30 %,
voire 35 %, leur journalisme se déployait-il alors avec audace,
créativité, indépendance ? Et, en France, l’information critique trônait-elle vraiment au
premier plan quand, milliards en main, les groupes Lagardère et
Bouygues se disputaient le contrôle de TF1 ? Ou quand, rivalisant de
vulgarité, les chaînes privées se multipliaient comme les pains du
Nouveau Testament, offrant des salaires de maharajas à une poignée de
journalistes qui avaient déjà démontré l’efficacité de leur dressage ?
En ce moment, nombre de directeurs de presse font front commun devant
l’orage et implorent le secours financier de celle qu’en d’autres
circonstances ils nomment avec dédain la « mamma étatique ». Le Monde diplomatique,
qui leur souhaite bonne chance, n’oublie pas la part qu’ils ont prise
dans leur infortune présente. Mais, pour continuer à défendre une
conception du journalisme différente de la leur, c’est d’abord à ses
lecteurs qu’il fait appel. Si les tourments des médias indiffèrent une large fraction de
l’opinion, c’est pour partie qu’elle a compris une chose : la mise en
avant de la « liberté d’expression » sert souvent de paravent aux
intérêts des propriétaires de moyens de communication. « Cela fait plusieurs décennies, estime le cofondateur du site dissident CounterPunch.com Alexander Cockburn, que
les journaux dominants ont plutôt fait obstruction ou saboté les
efforts destinés à améliorer notre situation sociale et politique (2) . »
Les enquêtes et reportages diligentés par la presse, de plus en plus
rares, permettent surtout de préserver la fiction d’un journalisme
d’investigation pendant que prolifèrent dans d’autres pages faits
divers, portraits, rubriques de consommation, de météorologie, de
sport, copinages littéraires. Sans oublier le simple copier-coller de
dépêches d’agences par des salariés en voie de déqualification rapide. « Imaginez, lance l’universitaire américain Robert McChesney, que
le gouvernement prenne un décret exigeant une réduction brutale de la
place accordée aux affaires internationales dans la presse, qu’il
impose la fermeture des bureaux de correspondants locaux, ou la
réduction sévère de leurs effectifs et de leurs budgets. Imaginez que
le chef de l’Etat donne l’ordre aux médias de concentrer leur attention
sur les célébrités et les broutilles plutôt que d’enquêter sur les
scandales associés au pouvoir exécutif. Dans une telle hypothèse, les
professeurs de journalisme auraient déclenché des grèves de la faim,
des universités entières auraient fermé à cause des protestations.
Pourtant, quand ce sont des intérêts privés en position de
quasi-monopole qui décident à peu près la même chose, on n’enregistre
pas de réaction notable (3) . » McChesney prolonge son exercice d’écologie mentale en posant la
question suivante : puisque la démocratie est sans cesse invoquée,
quand avons-nous au juste collectivement décidé — à quelle occasion ?
lors de quel scrutin majeur ? — qu’une poignée de très grandes
entreprises, financées par de la vente de publicité et prioritairement
soucieuses de dégager un profit maximum, seraient les principaux
artisans de notre information ? En 1934, le dirigeant radical français Edouard Daladier fustigeait les « deux cents familles » qui « placent au pouvoir leurs délégués » et qui « interviennent sur l’opinion publique, car elles contrôlent la presse ».
Trois quarts de siècle plus tard, moins d’une vingtaine de dynasties
exercent une influence comparable, mais à l’échelle de la planète. Le
pouvoir de ces nouvelles féodalités héréditaires — Murdoch, Bolloré,
Bertelsmann, Lagardère, Slim, Bouygues, Berlusconi, Cisneros, Arnault (4)… — excède souvent celui des gouvernements. Si Le Monde diplomatique
avait dépendu de l’une d’entre elles, eût-il mis en cause le contrôle
de l’édition par Lagardère ? Le destin qu’Arnault inflige à ses
ouvrières ? Les plantations de Bolloré en Afrique ? Revenant sur les conditions de son départ de Libération, le
quotidien qu’il avait fondé, après qu’Edouard de Rothschild eut fait
irruption dans le capital du journal, Serge July précise : « Edouard de Rothschild (…) acceptait
de s’engager financièrement, pour autant que je m’engage à quitter non
seulement mes fonctions, mais le journal. Je n’avais pas le choix, j’ai
accepté tout de suite (5) . »
Il est assez piquant que son successeur, imposé par l’actionnaire,
prétende aujourd’hui s’afficher en tribun de la liberté de la presse. Tout le mal actuel, entend-on souvent, viendrait de ce pelé, de ce
galeux d’Internet. Mais la Toile n’a pas décimé le journalisme ; il
chancelait depuis longtemps sous le poids des restructurations, du
marketing rédactionnel, du mépris des catégories populaires, de
l’emprise des milliardaires et des publicitaires. Ce n’est pas Internet
qui servit de caisse de résonance aux bobards des armées « alliées »
pendant la guerre du Golfe (1991) ou à ceux de l’Organisation du traité
de l’Atlantique nord (OTAN) pendant le conflit du Kosovo (1999).
Impossible également d’imputer à Internet l’incapacité des grands
médias à annoncer l’effondrement des caisses d’épargne aux Etats-Unis
(1989), puis à imaginer la déroute des pays émergents huit ans plus
tard, enfin à prévenir cette bulle immobilière dont le monde continue
de payer le prix. Les terribles accusations de pédophilie de l’affaire
d’Outreau ou d’antisémitisme du RER D ne provenaient pas non plus de la
Toile. Alors, s’il faut vraiment « sauver la presse », l’argent public
gagnerait à être réservé à ceux qui accomplissent une mission
d’information fiable et indépendante, pas aux colporteurs de ragots. Le
service de l’actionnaire et le commerce de « cerveaux disponibles »
trouveront leurs ressources ailleurs (6). Dans les reproches adressés à Internet, on décèle souvent autre
chose qu’une inquiétude légitime devant les modes d’acquisition du
savoir et de transmission de l’information : l’effroi que le magistère
de quelques barons du commentaire touche à son terme. Disposant d’un
privilège féodal, ceux-ci s’étaient taillé des domaines, ménagé des
sinécures ; ils pouvaient « faire » ou « défaire » ministères et
réputations. Un concert d’éloges unanimes accueillait avec la même
fièvre chacun de leurs ouvrages bâclés et de leurs tribunes ronflantes (7).
Quelques journaux irrévérencieux faisaient çà et là figure de
citadelles assiégées. Mais un jour, des sans-culottes ont débarqué avec
leurs claviers... Reconnaissons-le, le contexte d’ensemble d’une information chamboulée par une recomposition brutale (lire « Recomposition brutale, racolages à tous les rayons ») ne nous a pas épargnés, nous non plus. Après un essor ininterrompu entre 1996 et 2003, la diffusion en kiosques du Monde diplomatique
a enregistré un très fort recul jusqu’à l’année dernière ; le nombre
des abonnés, lui, a continué de progresser. En termes d’exemplaires
vendus, le tassement est néanmoins réel et nous ramène à nos chiffres
de 1995, juste avant la filialisation du journal (voir graphique
ci-dessous). Assurément, la perception générale s’améliore sensiblement
si l’on ajoute à ce total les soixante-treize éditions internationales
du mensuel (la première, en Italie, date de 1994), les quelque deux
millions d’exemplaires qu’elles diffusent et les centaines de milliers
de lecteurs en ligne de notre site. Mais audience et revenus sont choses bien différentes. Les ventes et
les abonnements représentent de très loin nos deux principaux piliers
financiers (8).
Les internautes contribuent à l’influence du journal, pas à son
existence. Et ceux d’entre eux qui ne participent jamais à nos recettes
opèrent à la manière des passagers clandestins dont l’intégralité du
déplacement est payée par les voyageurs ayant acheté un billet (voir
dans « Recomposition brutale, racolages à tous les rayons » la répartition de nos recettes). Pour survivre, nombre de journaux ont choisi d’aligner davantage
leur contenu sur les goûts supposés de leurs lecteurs. La destination
est connue d’avance : « Ils préfèrent les articles courts et les
nouvelles qui les concernent directement. Sur Internet, ils recherchent
plutôt ce qui va leur faciliter la vie. Les longs textes relatifs à la
politique étrangère sont d’autant moins prisés que les internautes se
contentent de survoler les titres. A Zero Hora, un quotidien
brésilien qui appartient au groupe RBS, le département de la diffusion
interroge cent vingt lecteurs sur ce qu’ils ont pensé du journal du
jour. Le directeur Marcelino Reich reçoit un rapport à 13 heures : “En
général, ils réclament davantage de suppléments sur la cuisine et
l’immobilier, et moins d’articles sur le Hezbollah et les tremblements
de terre.” (9) » Avouons que Le Monde diplomatique n’est probablement pas le titre qu’ils recherchent... La désaffection qui a atteint notre journal n’est pas étrangère au
découragement de ceux qui observent que, faute d’écho suffisant et de
relais politiques, la mise à nu des dispositifs principaux de l’ordre
social et international a eu peu d’effet sur la pérennité du système.
La lassitude du « à quoi ça sert ? » a donc peu à peu remplacé l’ancien
« que proposez-vous ? » qui, dans notre cas, ne se justifiait plus
guère tant au fil des ans les pistes et les propositions se sont
succédé dans ces pages (abolition de la dette du tiers-monde, réforme
des institutions internationales, taxe Tobin, nationalisation des
banques, protectionnisme européen, « guillotine fiscale » sur certains
revenus du capital, développement de l’économie solidaire et de la
sphère non marchande, etc.). A l’évidence, le déclin de l’altermondialisme nous a atteints plus
durement que d’autres. L’hégémonie intellectuelle du libéralisme fut
remise en cause, mais très vite l’argile s’est durcie. Car si la
critique ne suffit pas, la proposition non plus : l’ordre social n’est
pas un texte qu’il suffirait de « déconstruire » pour qu’il se
recompose tout seul ; nombre d’idées ébrèchent le monde réel sans que
les murs s’écroulent. Pourtant, on attend parfois de nous que les
événements se plient à nos espérances communes. Et dans le cas
contraire, on nous juge un peu déprimants... En tout cas, quand il s’agit de l’avenir de ce journal, nous fondons
notre optimisme sur une certitude, celle de pouvoir compter sur votre
concours. Nous ne relèverons donc pas nos tarifs pour le moment. Nous
les maintiendrons plus bas dans les pays pauvres. Nous poursuivrons
l’accompagnement de nouvelles éditions internationales en leur offrant
de nous verser des droits limités au démarrage. Nous demeurerons à la
pointe des technologies multimédias, notamment pour atteindre les
jeunes générations et assurer ainsi la transmission des valeurs
intellectuelles et politiques de notre journal (lire « Transmettre »).
Nous continuerons à commander davantage de grands reportages et
d’enquêtes de journalistes, de chercheurs, de militants aussi, sur les
conflits en cours, les crises, les alternatives, les expérimentations. Mais la poursuite de notre développement dépend pour une large part
de votre mobilisation financière à nos côtés. Achat plus régulier du
journal en kiosques, abonnement, offre d’abonnement à des lecteurs
potentiels, adhésion à l’association des Amis du Monde diplomatique :
vos moyens d’intervention sont nombreux. Et, depuis peu, un dispositif
nouveau a vu le jour. Il permet de déduire du montant de votre impôt
66 % des dons faits à notre journal. Ainsi, après avoir aidé les
banques, l’argent public pourrait enfin servir à enquêter sur leurs
turpitudes… Comparées à celles d’autres titres, nos pertes peuvent paraître
modestes (330 000 euros en 2007, 215 000 euros l’année dernière). Mais
aucun banquier désœuvré et brûlant de jouer au mécène ne se proposera
de les combler. Un journal comme le nôtre, dont l’ensemble des
personnels est actionnaire, dont les lecteurs, qui détiennent eux aussi
une part du capital, offrent des abonnements de solidarité aux
bibliothèques et aux prisons dépourvues de ressources, dont enfin le
directeur est élu, lui paraîtrait vraisemblablement assez peu
recommandable. La question qui nous est collectivement posée est simple : qui
d’autre que nous va continuer à financer un journalisme d’intérêt
général ouvert sur le monde, consacrer deux pages aux mineurs de
Zambie, à la marine chinoise, à la société lettone ? Ce mensuel n’est
pas exempt de défauts, mais il encourage les auteurs qui voyagent,
enquêtent, sortent de chez eux, écoutent, observent. Les journalistes
qui le conçoivent ne sont jamais conviés aux dîners du Siècle, ils ne
font pas de « ménages » pour les lobbies pharmaceutiques ou les
sociétés d’emballage, ils n’ont pas leur rond de serviette dans les
grands médias. Ceux-ci, d’ailleurs, qui relaient chaque « nouvelle
formule » d’un autre journal et qui transforment leurs « revues de
presse » en auberge réservée à cinq ou six titres, toujours les mêmes,
occultent avec application Le Monde diplomatique en dépit de son impact mondial sans équivalent. Au fond, c’est la rançon de notre singularité. Mais nous comptons tant de complices ailleurs : l’association des Amis du Monde diplomatique,
dont l’existence conforte l’indépendance de la rédaction et qui, chaque
mois, organise des dizaines de débats autour des thèmes que nous
développons ; les kiosquiers qui veillent à ce que notre journal reste
bien exposé, et parfois le recommandent ; les enseignants qui le font
connaître à leurs élèves ; la presse alternative qui tire profit de nos
informations et dont certains animateurs musardent dans nos colonnes ;
beaucoup de curieux, des journalistes francs-tireurs, quelques mauvais
caractères… Et vous tous, sans qui rien n’est possible.
il agonisait déjà
Right
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