Fragment

18 mars 2010

Mercredi 24 février
16 h 00
Gare de Lyon

Je sors d'un de ces kiosques à journaux, qui existent dans toutes les gares de France, avec sous le bras une minuscule bouteille d'eau à 1 neurone 70.....

Je me dirige vers l'écran sncf, qui indique les trains au départ.
Un peu plus loin dans cette foule en mouvement, j'aperçois une vieille dame immobile.
A vue de nez, je lui donne 70 ans. Elle vend des journaux elle aussi, des journaux de SDF.
Elle les tient entre ses bras, tel un présentoir, néanmoins je ne discerne pas les couvertures, mais qu'importe me dis je. Tout en plongeant ma main dans ma poche, à la recherche d'un peu de monnaies, j'arrive à sa hauteur... Et là, horreur !!!

Alors que je m'apprêtais à lui adresser la parole pour conclure une rapide transaction, je suis pétrifié, sur place, à la vue de la personnalité médiatique qui a les honneurs de la couverture du dernier numéro de macadam

Cette personnalité, n'est autre que MIMI MATHY

Après être resté au moins 2 secondes statufié, à ne savoir quoi dire, mon regard croise celui de la dame, malgré cela, je tourne les talons et tout penaud je me dirige vers ma destination initiale, en espérant oublier le plus rapidement possible cette piteuse histoire, dont je ne sors pas vraiment grandit....

Face à l'écran sncf, la voie de départ de mon train n'est toujours pas annoncée.
Je commence à cogiter et bien entendu par vagues successives et inéluctables, le remord commence à me chatouiller le cortex. Je me mets à jeter des œillades à la vieille dame, par dessus mon épaule. Elle n'a pas bougé, elle semble me fixer, son regard semble même rempli d'une certaine incompréhension....
A chaque œillade mon remord s'intensifie, tant est si bien qu'après quelques secondes, qui m'ont paru plus longues, je craque et me décide à l'accoster.

Moi : Bonjour madame, je voulais vous acheter un exemplaire du macadam, mais je ne peux décemment pas acheter un magazine avec Mimi Mathy en couverture.

La dame me sourit.
Une jeune fille brune sur ma gauche, portant des lunettes rectangle et blanche, tout en tapotant sur un écran tactile d 'un guichet sncf, tourne sa tête vers moi et se met à pouffer, en ajoutant

Elle : pffffff, c'est E-NOR-ME

Moi à la vieille dame : Je vais faire de la monnaie, je vous en donnerai, mais je ne prendrai pas le journal.

La Dame : Très bien monsieur, à tout de suite.

Quelques minutes plus tard, je reviens avec la fameuse monnaie. La vieille dame, ainsi que la jeune fille, n'ont pas bouger d'un millimètre.

Moi : Voilà.

Je lui donne 3 euros

La Dame : Mais vous savez j'ai d'autres journaux.

Elle me fourre entre les mains un magazine de mots croisés et de sudoku, je le prend, en me gardant bien de lui préciser que les sudoku ont été une de mes anciennes addictions....

La Dame : Oui, à ce qu'il parait, elle n'est pas si gentille que ça Mimi Mathy.

Moi : Je confirme, c'est une vraie peau de vache

La jeune fille à ma gauche pouffe encore.

La Dame : Vous la connaissez ?

Moi : Non, mais je tiens ça de source sur.

La Dame : Vous travaillez dans le cinéma ?

La jeune fille lâche alors des yeux son écran et me scrute de la tête au pied, en espérant surement reconnaitre une personnalité de la télévision ou du cinéma.

Moi : Non non, je le sais c'est tout. Elle est l'opposée de ce qu'elle montre dans son feuilleton "l'ange gardien" ou je ne sais plus quoi.

La Dame : Remarquez la dernière fois, c'était pire, on avait Carla Bruni en couverture

J'éclate de rire.

Moi : Oui, c'est vrai, j'avais même lu l'article, c'était horrible !!!

La Dame : C'était très dur à vendre.

Le silence fait son apparition dans notre conversation, la jeune fille me regarde une dernière fois et m'honore d'un sourire que j'interprète comme engageant....

Moi : Au revoir madame.

La Dame : Au revoir.

................

Mon train est enfin annoncé : Voie N° 13

................

Nous avons quitté la gare depuis maintenant 30 mn et je suis entrain de tapoter cette histoire sur mon Ipod, pour ne rien oublier.

Assise sur le siège devant moi, une enfant d'environ 5/6 ans alterne entre chanter la comptine "pirouette cacahuète" et passer sa main entre les sièges à la recherche de la mienne.
Je me mets à jouer avec elle.
Je la laisse tendre la main, mais je ne bouge pas.
C'est juste au moment ou elle se désespère et commence la retirer, que je lui en chatouille la paume.
Elle pousse alors un petit rire aigüe, qui me fait sourire à tous les coups.
Mais mes pensées sont de plus en plus habitées par l'image de la vieille dame restée Gare de Lyon.
Je me dis qu'elle aussi à eu 5 ans, qu'elle aussi a du chanter des chansons enfantines, qu'elle a eu une mère et un père et qu'aujourd'hui à 70 balais bien tapés, elle vend des journaux à la noix dans les courants d'air.

Je regarde le journal qu'elle m'a mis entre les mains. J'inspecte les grilles de sudoku pour en jauger la complexité, la petite fille devant moi gazouille, mon train fend l'air et je n'ai même pas de stylo.....

Posté par bazarboy à 15:25 - Commentaires […] - Permalien [#]

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